L’écho des paddocks – partie 3
Alexis Aveline, coordinateur technique et développement SI/SE), Ingénieur en électronique et informatique embarquée. Formation INSA Rennes appliqué au traitement de la donnée, appliquée aux télécommunications.
Des alertes sur des anomalies dans l’utilisation des bateaux
« Le traitement des datas se fait en deux temps, analyse puis réponses aux questions des navigants. Paul Médinger (ingénieur performance de TRRacing) fait les analyses comparatives. L’autre traitement réalisé avec Advens est la prédiction d’erreurs. On traite les alertes sur les anomalies dans l’utilisation des bateaux. En retour de navigation, je récupère les datas que je mets dans un algorithme développé par Advens, d’où je sors un tableau qui montre les dépassements des marges d’utilisation des charges du bateau. Advens, son « Chief Technical Officer» Jérémie Jourdin et ses équipes, réalisent ce traitement, Paul effectue un travail orienté performance pour les marins, et avec Advens, je travaille sur le développement, la fiabilité et la sécurité.
On peut ainsi vérifier toutes les données du bateau, comme les compressions sur le mât, les charges sur les foils, et on exploite ces mesures dans le développement du voilier, sur les nouveaux foils par exemple. On fait la synthèse des calculs d’Advens que l’on envoie aux architectes.
On est capable d’alerter sur tous les excès d’utilisation. On prévient d’éventuels défauts d’utilisation. On anticipe toute fragilité sur la coque, le gréement et les foils. On peut prédire les défauts de fonctionnement. »
L’interface avec Advens :
« L’interface homme-machine se fait avec Advens, pour comprendre d’où vient un défaut de vitesse par exemple, mieux régler le bateau et le pilote. Notre travail est guidé par le leitmotiv « performance et fiabilité ».
Cet environnement marin est complexe. Paul travaille sur l’influence de la mer sur le comportement du bateau, car l’aide à la performance à bord dépend de l’état de la mer.
Le premier métier d’Advens est la sécurisation des données et du réseau, protéger l’informatique embarquée, car le bateau est connecté en permanence. L’espionnage existe aussi en IMOCA. Advens a cette compétence. Nous n’avons pas de soucis sur les intrusions et les contrôles du flux de la data.
L’autre métier d’Advens, c’est l’équipement. La « Advens box » est la clé de la collecte de datas, qui permet la passerelle des données. Les capteurs peuvent donner le réglage d’une voile par exemple. Ces capteurs sur les voiles passent par l’Advens box qui transforme les données lues par la centrale de navigation. C’est une passerelle entre capteurs et centrale. Toutes les données pilotes (100 variables possibles) sont collectées par la box et renvoyées à la centrale. Thomas et Sam peuvent ainsi reproduire des réglages référents qu’ils ont eu par le passé. La box le permet dans son historique. On fait un « trim book » écrit par Paul, que l’on peut à tout moment envoyer à Thomas et qui contient des conseils de réglages. En entrainement, on reçoit les données du bateau toutes les 30 secondes, depuis les capteurs essentiels. C’est de la Formule1 pure, de la télémétrie, la circulation de la donnée du bateau vers la terre. Sur la Coupe de l’America, les teams disposent même d’une caméra qui permet de visualiser ce qui se passe à bord.
Je travaille en binôme avec Lucas Montagne pour l’installation des capteurs, et en binôme avec Paul sur l’exploitation. Avec Lucas, on choisit les capteurs, et on les installe ensemble, pour bien comprendre le bateau. Idem sur l’informatique et l’énergie. Je fais le suivi de calibration des capteurs sur la centrale. Je fais le suivi du pilote automatique, Lucas est sur l’énergie, l’électricité et le câblage. »
50 millions de datas analysés par Advens !
L’implication d’Advens, ses spécialistes et sa technologies mises au service de la performance de TR Racing et de ses deux bateaux engagés dans la Transat Jacques Vabre 2023 victorieuse du VULNERABLE de Thomas Ruyant, et auréolée de la troisième place du VULNERABLE de Sam Goodchild, permet aux équipes techniques de disposer dès l’arrivée de solides analyses de la performance des bateaux tout au long de leurs 5 400 milles de course. Cette qualité et cette rapidité dans l’analyse et la compréhension du comportement des bateaux sont le fruit du travail d’Advens et de sa technologie pilotée par Jérémie Jourdin.
« La nouveauté pour TR Racing, Thomas et Sam, est que cette analyse a été faite directement sur les outils embarqués. Jusqu’à présent, on automatisait les traitements pour aider les équipes de TR Racing à faire les analyses suite aux navigations. Aujourd’hui, on utilise l’intégralité des moyens d’Advens. Le gain est qu’on a réussi à faire les analyses en un temps record. Un jour après l’arrivée en Martinique, Thomas disposait de tous les rapports de performances avec un niveau de précision inégalée. Gain de temps et de précision, et des données haute fréquence qui génèrent énormément de datas, 50 millions d’entrées analysées en l’occurrence.
Ces donnée servent à la performance ; était-on bien réglé, tel réglage a-t’il eu un impact positif ou négatif sur la perf, les hypothèses de réglages des polaires avant la course sont-elles confirmées ou non? autant de questions auxquelles nous sommes en mesure de répondre dès la ligne d’arrivée franchie.
On fait des hypothèses, on capitalise sur la course et on tire les conclusions pour savoir si le bateau s’est comporté comme attendu. Il arrive qu’on soit au-dessus de nos attentes.
L’apport d’Advens est la rapidité. On a virtualisé le bateau à Lille, avec une centrale de navigation virtuelle, une box virtuelle et on a moins besoin de naviguer (cela reste nécessaire mais 80% du travail est fait à Lille et les 20% sont de l’adaptation sur le bateau à Lorient. On n’a pas changé la technicité, mais on est passé à l’ère de l’automatisation, ce qui change tout car entre le moment d’une prise de décision et son application, les délais sont moindres. Le Vendée Globe est en ligne de mire. On augmente notre niveau d’exigence et la précision de nos outils. On arrive toujours à trouver des facteurs d’optimisation, des bugs à déceler. Notre tamis se réduit encore, On est dans le détail. »
Conclusion :
Dans un contexte de course au large ultra compétitif, TR Racing présente un nouveau modèle d’écurie de course au large basé sur la mutualisation des expériences et vécus de deux marins aguerris et deux bateaux à la pointe du développement de la classe Imoca. La quête de la performance technologique et sportive s’appuie désormais sur la synergie et l’intelligence collective d’une équipe de techniciens et d’ingénieurs de haute volée, soutenu par les savoir-faires d’Advens, partenaire technologique et financier. Ce niveau de collaboration ente une équipe sportive et un partenaire est en soi tout à fait novateur. Thomas et Sam bénéficient ainsi d’atouts exceptionnels pour aborder au mieux le Vendée Globe. C’est dans le partage du développement que se partagera le succès.
© Pierre Bouras