
A l’instar des membres de son groupe compact des lointains poursuivants des leaders de ce Vendée Globe, Sam Goodchild affronte de pénibles conditions de navigation au coeur du Pacifique Sud, caractérisées par une grande instabilité du vent, combinée avec une mer formée et désordonnée qui empêche les foilers d’exprimer toutes leurs capacités de glisse, voire de vol. Les vitesses s’en ressentent, et la vie du bord s’est dégradée, avec cette obligation permanente de réagir aux importants changements de force et de direction du vent. Porter la toile du temps est une gageure, à laquelle les solitaires peinent à répondre, risquant en permanence de se trouver surtoilé dans les grains ultra rapides du Pacifique qui laissent peu de place à la sage anticipation du marin au long cours. Sam lutte ainsi âprement contre ces éléments si peu coopératifs, toujours habité de cette flegmatique lucidité à tout ce qui l’entoure, à commencer par le bien être et la santé de son VULNERABLE, dont il sent, après plus de 14 000 milles parcourus, monter la fatigue. Encore une pleine semaine de ce régime venté et tempétueux l’attende pourtant, avant la délivrance du cap Horn et le retour en Atlantique, d’ici au 28 décembre certainement.
⚠️ Dernière minute : La nuit australe tombait sur Sam ce matin heure Française quand la grande voile d’avant qui tractait VULNERABLE est soudainement tombée à l’eau. Sam a immédiatement arrêté le bateau et constaté que les 180 m2 de tissus trempaient dans l’eau, en partie enroulés autour de son foil bâbord. Le Britannique de VULNERABLE, après un court moment de réflexion, s’est attelé à remonter à la force des bras l’intégralité de sa voile, sans même l’abimer, et est parvenu à la rentrer en soute, le tout en à peine une heure.
📞 💬 Sam Goodchild :
– Tu navigues de nouveau dans des conditions de vent et de mer difficiles….
« La nuit dernière n’était pas très sympa, avec pas mal de mer, 5 mètres de creux, avec des surfs que l’on n’aime pas, du vent rafaleux, entre 22 et 40 noeuds! Pas simple de changer les voiles. Avec les grosses vagues, on ne peut pas se permettre de naviguer sur toilé. On attend que le vent faiblisse. On réduit au maximum. En regardant les vitesses de la flotte, je crois que je ne suis pas le seul à souffrir. On a encore pas mal de grains qui arrivent à une vitesse incroyable. Tu as à peine le temps de les voir arriver qu’ils sont déjà sur nous. C’est l’état de la mer qui nous empêche de bien passer. »
– Cette dépression favorise-t’elle les leaders, qui ont moins de mer en avant du front? L’élastique semble se tendre par devant!
« Je ne regard même pas les leaders. C’est la météo en Atlantique qui décidera de l’issue de la course. Je ne regarde pas les écarts. »
54-55 ° Sud. Es tu déjà descendu aussi Sud?
« Oui en passant le Horn avec Holcim durant The Ocean Race. On avait navigué par 60° Sud si je me souviens . On avait eu très froid! »
– Quelle est la température extérieure et celle de l’eau? Surveilles-tu cette température rapport aux growlers?
« Il fait 13° dans le bateau et je n’ai pas le capteur dans l’eau, mais je ne surveille pas. L’organisation nous a mis bien à l’abri des growlers. Pas d’iceberg à cette latitude. Il y a de la neige dans les grains cependant. »
– Commences-tu à penser au Horn?
« Oui. Le bateau commence à fatiguer. Rien de grave. Cela fait un bout de temps qu’on est dans des conditions musclées et je n’ai pas pu faire un vrai check du bateau. Juste des petits soucis techniques, que j’aimerai pouvoir gérer dans moins de vent, quand ça se calmera un peu. Le pilote notamment qui m’a lâché une heure hier! Je dois vider une petite fuite d’eau toutes les 6 heures au niveau du puits de quille. Rien de très embêtant mais c’est l’accumulation des petits soucis qui me dit que le bateau fatigue. »
– Es tu étonné du rythme des premiers après 42 jours?
« Le rythme est très élevé. C’est impressionnant. Je pensais que ça allait se calmer mais ce n’est pas le cas. Dès qu’on n’est pas à fond, on perd des milles. »
– Penses tu que certains bateaux ont des soucis mais refusent d’en parler?
« Oui je pense que tout le monde a de petits soucis. On n’en connaît pas la gravité. On ne le saura jamais. Mais seulement 4 abandons depuis le départ, c’est peu; Personne ne quitte le train! »
– Comprends tu cette stratégie du secret?
« Oui parfaitement. Quand on est au coude à coude, on sait que l’adversaire va attaquer davantage s’il connait tes soucis. Savoir que le gars en face a des soucis t’incite à gérer le risque différemment. »
– La Zone d’Exclusion des glaces est elle plus contraignante dans le Pacifique?
« Oui dans le sens où on doit faire du Sud pour passer le Horn. On doit rebondir en permanence sur cette zone. »
– Regardes-tu du côté de Justine Mettraux? que penses-tu de sa course?
« Elle n’est pas loin. Elle va encore se rapprocher. Je ne suis pas surpris par ses performances. C’est un marin très expérimenté. Elle a pu lâcher Sam et Clarisse. »
– ETA Horn?
« Plutôt le 28 décembre, dans une semaine! »